A l’ère de la musique Kleenex et du Mp3 jetable, agiter le barnum médiatique s’impose comme un indispensable vital à la survie des artistes populaires. Créer le Buzz et l’alimenter devient une aptitude prisée par les Majors, reléguant parfois au second plan des critères jusque-là décisifs, comme le talent ou la créativité. Pourtant, contrairement à la croyance populaire, les chevaliers du « Buzz » sont loin d’être des manchots : Michael Jackson, Roi incontesté du « disque évènement », ou encore David Bowie, le Geppetto des critiques musicaux, en sont les illustres pourvoyeurs. Le Buzz, simple nécessité de crise ou flambée d’innovation ?
Celui par qui tout a commencé
Avant de se voir sacré « homme le plus populaire de tous les temps » par le Guiness Book des records, devançant un certain Jesus (!), le jeune Jackson a roulé sa bosse dans un Star-System encore marqué par les relents ségrégationnistes, et s’est d’abord cantonné au statut d’icône de la communauté noire, à la manière d’un James Brown ou d’un Sammy Davis Jr. C’est donc sur les cendres d’une discrimination raciale que la feuille de route du Buzz s’est dessinée. Cultiver la rareté, susciter la curiosité et se forger une réputation de « Freak » ont propulsé Jackson hors de l’espace temps. Premier fait d’arme, lancer et entretenir la rumeur, car, comme se plaisait à le répéter le Moonwalker, « la nature a horreur du vide ». Du caisson de jouvence aux bains de Perrier, en passant par le blanchiment de peau et les ossements d’Elephant Man, le ganté fut à l’origine de bon nombre de rumeurs le concernant, allant jusqu’à contacter des Tabloïds sous une fausse identité pour livrer des « scoops croustillants ». Implacable. Une recette remise au goût du jour par les cravateux de l’industrie musicale et boostée à son extrême par les déhanchés douteux de Jennifer Lopez et les tenues « légères » de Rihanna.
« Less Is More »
Janvier 2013, David Bowie mystifie les réseaux sociaux, crée l’évènement et tient la planète en haleine par une nouvelle déconcertante de simplicité : son nouvel album est dans les bacs. Là où les majors multiplient les sessions de Brainstorming pour dénicher l’effet d’annonce qui fera tilt, Bowie s’est contenté de préserver le secret et de prévenir toute fuite de son nouvel effort, et ça marche ! La simplicité, rare et curieuse, devient un argument marketing de premier choix. Communier avec un public de plus en plus versatile, sans bifurquer par les canaux marketing classiques semble porter ses fruits. Prince, autre prophète des dieux de la Pop, a abandonné son patronyme dès 1993 pour adopter une identité imprononçable, se contentant d’albums avant-gardistes qui ont fini d’asseoir une carrière atypique dans le monde de la Pop.